Un soir de février à Rillieux le Généreux, aux confins septentrionaux de l’agglomération...
A l’orée des forêts sombres, où la nuit on entend rugir les grands fauves, Il en a fallu du courage à ces 12 joueurs rouges et noirs pour, cheminer jusqu’ici,
Des joueurs dont certains portent encore les stigmates de LA soirée moustache,
Même si une cellule psychologique avait été rapidement mise en place,
Même avec l’assistance d’éminents pilologues, spécialistes en trauma-pilosité,
Oui, quelques uns ont encore des séquelles de l’événement,
Gui est toujours dans le déni, laisse repousser sa beubar en effaçant la stache,
Vertige de la psyché humaine, Pierre a au contraire laissée pousser la sienne en mode tombante,
« Eh les gars, eh, Charles Bronson, non ? » Il s’est même acheté un fusil canon scié,
Tandis que d’autres l’ont conservée plus fine, persuadés de ressembler à Brad Pitt dans Inglorious Basterds,
Leurs meufs sont parties, fatiguées de partager la couche d’un genre de Ticky Holgado,
Heureusement qu’il y a le football, une bouée dans l’océan de la vie à laquelle se raccrochent les crucirojos,
Et ils arrivent en ordre dispersé sur le lieu de la rencontre, au lieu-dit « Loup pendu »
Aaaaah putain ça fait flipper ! Mais c’est dégeu c’est quoi ça ?
C’est un loup qui pend le long du lampadaire au dessus du vestiaire,
Ici, c’est une vieille coutume, il font ça depuis le Moyen-Age, raconte Kobri,
L’histoire remonte à l’hiver 1337, le plus glacial jamais connu, On entendait craquer les arbres qui parfois s’effondraient en poussières de cristal
Les oiseaux gelaient immédiatement après leur envol,
Et les loups affamés sortaient des forêts en quête de nourriture, Glandeline la Chtiotte fut ici dévorée, alors qu’elle allait chercher du petit bois,
A la tombée de la nuit, quelle conne, elle aurait du se méfier,
Le loup fut pourchassé, entravé et amené au gibet après un procès expéditif,
Au Moyen-Age, il arrivait qu’on juge les animaux, ils avaient même des avocats,
Le gibet est resté, a traversé les siècles, pour punir les lupis prédateurs,
Tu vois celui-ci qui se balance ? Encore hier, il attaquait des clients sur le parking d’Auchan,
Bonjour l’ambiance, en plus le terrain est détrempé, C’est sûr qu’on joue ou bien ? Le milieu du terrain brille comme une rizière de cacao,
Mais oui regarde, nos adversaires sont déjà là, Vitt April, qu’ils s’appellent, on les a pas encore joué cette année,
Et Raf, il devait pas être là ?
Plus tard, certains diront avoir vu son Porsche Cayenne faire un passage sur le parking du stade,
Les phares de sa voiture ont fait briller un instant le terrain luisant d’humidité,
et puis il est reparti dans un crissement de pneus, Tupac à fond sur son autoradio,
Regarde, y’a même des traces de pneus et des tessons de bouteille de cidre,
Bref les joueurs ajustent leurs collants, enfilent leurs shorts et leurs kroumirs stabilisées.
Ce soir, est sans doute présent le futur meilleur buteur de l’équipe,
Eh oui fin de saison pour le Flo parti en Go Slow vers le Maroc pour un voyage d’affaires,
Déjà 9 ou 10 buts au compteur pour l’attaquant vedette qui en restera là,
Et 4 hommes sont déjà à l’affût pour le coiffer au poteau :
Yvan est l’homme en forme, d’après ses propres mots il est en mode zlatan,
Il a même marqué plus de buts que Messi en cette année 2013,
Moitié Balo, Moitié Canto, il plante des doublés en veux tu en voilà,
Albert le Catalan continue lui son ascension tranquille,
Première saison au FAR, passeur décisif et buteur match après match,
Un prétendant sérieux pour le podium,
Mais le meilleur buteur viendra peut-être de la ligne défensive :
Péto le Jeune, scoreur polyvalent, qui sait frapper de loin ou croiser le ballon de la tête au cœur des six mètres,
Et puis il y a Kobri, le vieil attaquant en plein doute,
Trois mois sans marquer le moindre but, des centaines de minutes à vendanger, à faire des zigzags dans les surfaces adverses, une longue traversée du désert,
En tout cas ces quatre là marquent contre Vitt April,
Sur coup franc ou de la tête, au physique en emportant la défense ou en ajustant une frappe à la limite de la surface,
Et permettent par quatre fois au Far de prendre l’avantage,
Mais par quatre fois Vitt April revient à la hauteur,
Vitt April : quatre roues motrices, 11 soupapes, de la reprise,
Un zéro un un deux un deux deux trois deux trois trois quatre trois quatre quatre
Le FAR a tendance à prendre beaucoup de buts cette saison,
La faute ce soir à un projecteur mal réglé ? Aveuglé, Richard laisse filer quelques balles,
Les dernières minutes sont bien longues, mais le score en restera là,
Une belle équipe en face, le score final est très logique,
Le Prèze est certes un peu déçu mais reste pragmatique,
Rassemblant ses joueurs il cite le président Mao
« Si tu veux franchir la montagne, ne regarde pas vers le haut » Un long silence s’ensuit...pas sûr que les joueurs aient comprendus, En tout cas le combat fut bien rude à l’ombre du loup pendu.